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Les « surplus » d’or noir: un « surplus d’intox » pour masquer les cygnes noirs.

A part peut-être Didier Saint Georges chez Carmignac, Steen Jacobsen, notre concepteur de scénarios anti consensuels et Albert Edwards, le plus « bear » de tous les « bears », « global strategist » à la Société Générale (basé à New York), la recommandation unanime des gérants « mainstream » pour 2016 était « haro sur Wall Street, les pays émergents, les matières premières » et les all in » sur les actions européennes « où il y a tant de dossiers sous-évalués » (impossible de leur faire avouer lesquels, c’est un secret !).

Quinze jours plus tard, bingo ! Les indices US se retrouvent à 12 ou 13% de leurs sommets, les indices européens à -20% et plus.

Pour les trublions de « l’asset management », pour les esprits les plus subversifs, 2016 pourrait être l’année de l’amorce du début d’un commencement de rebond pour les matières premières.

Quelle audace intellectuelle, quel pari fou !

Ce qui signifie -en creux- que la majorité des « sherpas » des marchés voient le cuivre, le palladium, l’argent, le nickel redescendre plus bas que le fond des puits de mine dont ils ont été extraits.

Ils considèrent donc que les principaux producteurs vont continuer d’éventrer, de fourailler à perte la croute terrestre, de financer des couvertures sur les marchés à terme pour des quantités de minerais qui ne vont pas trouver preneur… puisque la Chine a spectaculairement réduit ses importations (de l’ordre de -15% en 2015).

Deux paragraphes plus loin, les mêmes économistes font étalage de leur confiance dans la vigueur de la croissance mondiale: ils invoquent la Chine dont la croissance de « presque » 7% a encore de quoi nous faire rêver.

Il y a de quoi en effet fantasmer lorsque la hausse du PIB français est attendue entre +1,6% pour l’INSEE et moins de la moitié (+0,7%) pour Marc Touati.

Il y aussi de quoi s’étonner de la conviction que le cours du pétrole va continuer de s’effondrer alors que la Chine afficherait toujours « autour de » +7% de croissance.

Parce que si c’est bien la réalité, une hausse annuelle de 7% de la consommation de pétrole, par un pays qui importe l’équivalent de 7,5 millions de baril par jour -même si c’est loin des +10% annuels de 2012- cela représente encore un sacré paquet de barils de plus par jour, et plus précisément, de l’ordre d’un demi million.

Sachant que les excédents de production actuels sont estimés à 1,5Mns de barils/jour, sachant que le pétrole offshore vénézuélien revient à plus de 40$ sorti du puits mais bien plus cher une fois raffiné, sachant qu’avec un cours inférieur à 50$, 4 millions de barils/jour sont produits à perte aux Etats Unis -ainsi que la totalité du pétrole bitumineux au Canada-, la théorie des surplus ne tient pas vraiment la route.

Sauf à prendre pour hypothèse que le « shale oil » non rentable va être subventionné ad vitam en Amérique du Nord et que le Venézuela va continuer de faire cadeau de son huile aux « gringos » qui cherchent par tous les moyens à dégommer le régime en place, la chute du baril pour cause d’un excès d’offre de « physique » a peu de chances de se poursuivre plus de quelques semaines.
En revanche, du « pétrole papier » (de grosses positions acheteuses à terme), il y en a effectivement à revendre, les taux zéro ayant encouragé le gonflement des encours de dérivés adossés aux matières premières (coût d’emprunt quasi nul, coût de portage longtemps insignifiant par rapport au prix du baril).

Alors bien sur, il y a l’Iran qui vient de célébrer ce 17 janvier la fin de l’embargo instauré par les Etats Unis et ses alliés.

Mais cet embargo ne concernait que les exportations à destination des alliés des USA: l’Iran a continué d’exporter vers la Chine (qui absorbe 20% de sa production), vers l’Inde (17%) et d’autres pays d’Asie, vers la Turquie, l’Afrique du Sud, etc.

Pour accroitre sa production -de l’ordre de 500.00/jour-, l’Iran va devoir investir dans la rénovation de ses infrastructures pétrolières: la levée de l’embargo devrait lui permettre avec la possibilité de renouveler son matériel auprès de fournisseurs américains ou européens (Kinder Morgan, Tenaris, Technip, Vallourec…) mais avec un pétrole à 30$, l’Iran ne dispose pas d’une marge de manœuvre ni de réserves financières très confortables.

Alors, la déferlante du pétrole iranien, comme si Téhéran avait dû fermer tous les robinet pendant 10 ans, c’est de l’intox pure et simple… mais pourtant, la plupart des « spécialistes » (ou qui s’improvisent comme tel) reprennent cette thèse les yeux fermés pour justifier l’effondrement actuel de l’or noir.

L’Iran, en revanche, pourrait accroitre fortement sa production gazière si elle installait de nouvelles plateformes offshore dans le Golfe Persique, et là, il y aurait effectivement surproduction mondiale de gaz et un vrai risque pour les prix dont le Qatar mais aussi et surtout l’Algérie, le Kazakhstan et la Russie seraient les principales victimes.

Et le statut de victime, ce n’est pas le genre de rôle dans lequel aime se complaire Moscou, surtout dans un monde où les pays finançant ouvertement le terrorisme et le djihadisme qui assassine des ressortissants européens par centaines bénéficient encore d’une totale impunité de la part des Etats Unis.

La Russie serait sur le point de dévoiler une batterie de ripostes à caractère financier (restrictions sur des remboursements en Dollar) au pire moment pour Wall Street et le système bancaire occidental qui croule sous les surplus d’encours spéculatifs non rentables sur les taux, les devises, les actions, les matières premières et le pétrole.

La bulle des « commodities » a explosé, la réaction en chaine habituelle conduisant à l’éclatement de la bulle obligataire puis de la bulle boursière -toujours dans le même ordre- est enclenchée.
Mais il fallait un coupable -les « surplus » pétroliers- pour masquer les véritables « surplus », ceux de « pétrole papier », de « dette papier » et par dessus tout, de « monnaie dette », le grand œuvre des banques centrales qui a permis de transférer l’essentiel de la richesse des 99% au profit des 1%.

Lorsqu’il n’y a plus rien à transférer, lorsque qu’il n’y a plus de croissance et seulement de la dette, la fausse monnaie s’autodétruit et la partie s’arrête.

C’est alors que les actifs « concrets » -or, argent, « commos »- prennent leur revanche… et elle promet d’être terrible.


Ph Béchade

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