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Un morceau de sucre pour les banquiers centraux

Draghi et le sucre

D’après la science, le contrôle de soi (self-control) est une ressource limitée, que tout le monde possède en quantité plus ou moins variable et qui permet de travailler à l’accomplissement d’un but (Baumeister & Heatherton, 1996). Ainsi, pour accomplir un but, il faut dépenser cette ressource qui n’existe qu’en quantité limitée. Le cas échéant, si cette ressource vient à manquer, elle peut toujours être rechargée (sommeil, activité relaxante, etc.). Il est donc impératif de choisir comment la dépenser judicieusement.

En 2007, une étude scientifique de Vohs et Faber étudiait l’impact de l’épuisement de ce fameux self-control sur les achats impulsifs et concluait que les participants à cette étude qui avaient dépensé leur précieuse ressource préalablement à une situation d’achat étaient plus enclins à acheter impulsivement, c’est-à-dire acheter plus de produits, mais aussi les payer plus cher. En 2008, une nouvelle publication de Masicampo et Baumeister présentait des résultats similaires, mais cette fois concernant la location d’appartements.

Encore en 2007, Gaillot et Baumeister publiaient une revue d’études montrant l’impact du taux de sucre dans le sang (glycémie) sur le contrôle de soi. En cas d’un niveau de sucre trop bas par rapport à la norme, le contrôle de soi est affecté et pourrait même pousser à des comportements dangereux : « De nombreuses études ont relié un faible taux de glucose à une large fourchette de comportements criminels, agressifs et impulsifs, incluant abus d’enfants ou d’épouses, fausses alertes au feu, détournements, destructions de propriétés, infractions au code de la route, vol à l’étalage, masturbation publique, exhibitionnisme, jets de pierre et bagarres, etc. »

Finalement, en 2010, une étude réalisée sur un échantillon de 1112 juges a mesuré leur taux de décisions favorables tout au long d’une journée avec deux pauses repas. Les résultats sont frappants : le taux de décisions favorables passe d’environ 65% en moyenne après un repas à près de 0% juste avant un repas ou en fin de la journée.

Conclusion : aidons nos banquiers centraux à se retenir de prendre leurs décisions en soutenant leur glycémie, envoyons leur du sucre.

 

Par Raphaël Becanne

Baumeister, R. F., & Heatherton, T. F. (1996). Self-regulation failure: an overview. Psychological Inquiry, 7(1), 1–15.

Danziger, S., Levav, J., & Avnaim-Pesso, L. (2011). Extraneous factors in judicial decisions. Proceedings of the National Academy of Sciences, 108(17), 6889–6892.

Gailliot, M. T., & Baumeister, R. F. (2007). The Physiology of Willpower: Linking Blood Glucose to Self-Control. Personality and Social Psychology Review, 11(4), 303–327.

Masicampo, E. J., & Baumeister, R. F. (2008). Toward a physiology of dual-process reasoning and judgment: Lemonade, willpower, and expensive rule-based analysis. Psychological Science, 19(3), 255–260.

Vohs, K. D., & Faber, R. J. (2007). Spent resources: Self-regulatory resource availability affects impulse buying. Journal of Consumer Research, 33(4), 537–547.

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